Publication | U4 Report

Le secteur de l’or à Madagascar : au cœur des pratiques illicites

Le cas de Dabolava et Betsiaka

Exploitation aurifère, une addition salée pour l’État malgache

L’Afrique perd chaque année 88,6 milliards USD à cause des flux financiers illicites.d4c4a3d79d0f À Madagascar, l’exploitation aurifère pourrait constituer une source de développement significative à moyen et long terme pour le gouvernement malgache, notamment grâce aux différents gisements éparpillés sur tout le territoire, dont le plus grand sitese trouve dans la région de Diana, plus précisément dans le district d’Ambilobe, commune rurale de Betsiaka.dffe15cb4173 Malheureusement, le métal précieux ne fait la richesse que d’un petit groupe et ne contribue pas au développement du pays.

Glossaire

Abus de fonction*1 : Le fait par un agent public d’abuser de ses fonctions ou de son poste, en accomplissant ou en s’abstenant d’accomplir, dans l’exercice de ses fonctions, un acte en violation des lois et règlements afin d’obtenir un avantage indu pour lui-même ou pour une autre personne ou entité.

Corruption active*2 : Le fait de proposer sans droit, directement ou par personne interposée des offres, promesses, dons, présents ou avantages quelconques pour obtenir d’une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou investie d’un mandat électif public.

Corruption passive*3 : Le fait par une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou investie d’un mandat électif public, de solliciter ou d’agréer, sans droit directement ou par personne interposée, des offres, promesses, dons, présents ou avantages quelconques pour accomplir ou s’abstenir d’accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat, ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat.

DINA : Concept malgache de convention collective définie comme étant un ensemble de règles communautaires coutumières afin d’organiser la société issue des besoins de la volonté populaire et acceptée par tous. Elle est spécifique selon les communautés.

Fatana : Exploitation minière aurifère artisanale à petite échelle par utilisation d’un processus d’extraction des roches souterraines avec creusage et bois de chauffe. La particularité des fatana étant l’utilisation de bois de chauffe pour créer un brasier qui va défragmenter la roche sous l’effet du brasier, ceci afin de faciliter son transport vers la surface.

Favoritisme*4 : Toute personne dépositaire de l’autorité publique qui aura procuré ou tenté de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires dans les marchés publics et les transferts contractuels de gestion des services publics.

Grand Patron : Personne, souvent d’identité inconnue, à la direction du réseau d’intermédiaires, chargée de la collecte et de financement illicite des fatana.

Papango : Personne se déplaçant de commune en commune de manière furtive pour acheter et collecter de l’or artisanal en proposant des taux supérieurs à la valeur pratiquée dans la zone. Le papango exerce la fonction de collecteur de manière informelle.

Sponsor : Personne ou groupe de personnes finançant des activités aurifères artisanales à travers des moyens financiers ou par la dotation de matériel et de ration aux ouvriers ou via le propriétaire de fatana.

Trafic d’influence*5 : Le fait par quiconque, de solliciter ou d’agréer, directement ou par personne interposée, des offres, promesses, dons, présents ou avantages quelconques pour abuser de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d’une autorité ou d’une administration publique des distinctions, décorations, emplois, marchés ou toute autre décision favorable.

*1 Voir la loi n° 2016- 020 sur la lutte contre la corruption, Article 26.

*2 Voir la loi n° 2016- 020 sur la lutte contre la corruption, Article 22.

*3 Voir la loi n° 2016- 020 sur la lutte contre la corruption, Article 21

*4 Voir la loi n° 2016- 020 sur la lutte contre la corruption, Article 19.

*5 Voir la loi n° 2016- 020 sur la lutte contre la corruption, Article 25.

Le nouveau ministre des Mines et des Ressources stratégiques, Olivier Rakotomalala, a indiqué lors de sa prise de fonction en mars 2022 que Madagascar faisait état d’une perte annuelle allant jusqu’à 7 tonnes d’or.6daa3b5bb78f D’après le rapport officiel ITIE 2019-2020, Madagascar n’enregistre que 2 423 kilos d’or exportés en 2019 et 1 778,83 kilos en 2020.

L’informel reste prédominant dans le secteur aurifère malgache.4c6514b097af Le Bureau du cadastre minier de Madagascar (BCMM) a d’ailleurs observé une augmentation du nombre d’exploitants illicites d’or en 2019.c28e5947f19b Selon le BCMM, seuls 3 000 orpailleurs sur les 500 000 recensés dans tout Madagascar ont procédé à la formalisation de leurs activités. Par ailleurs, le Service de renseignements financiers de Madagascar (SAMIFIN) a déclaré que l’argent suspecté sale a triplé de 2019 à 2021.fa7f4f6484e5

L’État malgache a adopté différentes mesures pour améliorer la gouvernance de l’exploitation minière artisanale et à petite échelle (EMAPE) aurifère. Ces mesures se traduisent par :

  • la mise en place de lois portant sur le Code minier et ses textes d’application ;538d34abf654
  • l’adoption de textes portant sur le régime de l’or ;925cf27e1bc5
  • la mise en place de l’Agence nationale de la filière Or (ANOR), un établissement public à caractère industriel et commercial en 2015.

L’ANOR a lancé l’élaboration de la stratégie de gouvernance du secteur aurifère en 2017 mais malheureusement cette initiative n’a pas abouti à un document de stratégie. Par ailleurs, la Banque centrale malgache a mis en place en 2020 une réserve nationale de l’or afin d’harmoniser la commercialisation de l’or à Madagascar.383309821cd6 En mai 2022, l’État malgache a approuvé, en Conseil des ministres, la mise en œuvre de zones d’encadrement des groupements des petits exploitants miniers et orpailleurs.a2e1925d3165

Malgré ces mesures, on estime à près de 2 tonnes/an la quantité d’or sortant illicitement du territoire malgache.c9f5c3b90353 En 2020, une différence énorme entre les données officielles et les quantités réelles d’or sorties du territoire malgache a été constatée.0e814ab22dba Ainsi, les statistiques mondiales affichent 20 tonnes d’or exportées contre seulement 2 tonnes d’or environ déclarées sur le territoire malgache.50ad41e1584c Toujours en 2020, 938 kg d’or ont été déclarés officiellement exportés alors que les statistiques miroirs provenant des pays destinataires font état de 2 à 3 tonnes d’or importées chaque année de Madagascar.cfe89f271e3d

Entre autres, parmi les affaires appréhendées :

  • 25 kg d’or ont été saisis sur trois ressortissants malgaches à l’aéroport Sir Seewoosagar Ramgoolam (SSR) de l’île Maurice606641431743 en 2019 ;
  • une tentative de contrebande de 15 kg d’or à destination de Dubaï a été interceptée à l’aéroport d’Ivato en novembre 2020 ;fc277a5f14e3
  • la saisie de 73,5 kg d’or exportés illicitement de Madagascar à Johannesburg qui a défrayé la chronique au début de l’année 2021 .d4e2f583caf2

Malgré ces saisies, les tentatives d’exportation illicite d’or n’ont pas cessé. Par exemple, de décembre 2021 au mois de juillet 2022, 5 trafics illicites d’or ont été déjoués par les autorités, notamment :

  • 49 kg de lingots d’or saisis aux Comores en décembre 2021 ;5f60702231d1
  • 7 kg de lingots d’or dans la partie nord-ouest de Madagascar par voie maritime en avril 2022;c1a32c2c79c4
  • 1,310 kg d’or que trois ressortissants étrangers ont tenté de faire sortir illégalement du pays dont l’un d’entre eux a dissimulé 895 g dans son rectum en juinf406a9d47766 2022 ;
  • 835 g d’or et 20 g de saphir saisis sur un trafiquant en juin 2022 ;86681429393b et
  • près de 2 kg d’or saisis à Nosy-Be en juillet 2022.ddf547ddc94b

En plus des exportations illicites d’or, l’État malgache a perdu 389 milliards MGA en 2020 à cause du non-rapatriement de devises des exportateurs d’or.22f869afd9d2 En effet, sur 22 opérateurs ayant reçu l’autorisation, 11 ont exporté de l’or au titre de l’année 2020.73cf4b0906a5 La majorité d’entre eux n’ont pas rapatrié leurs devises. Or, le Code de change dispose qu’un opérateur dispose de 90 jours pour rapatrier les devises issues des échanges commerciaux et les verser sur un compte national. L’injection directe de cette somme dans le marché interbancaire de devises (MID) pourrait considérablement impacter la valeur de la monnaie nationale avec un risque que celle-ci se déprécie si le rapatriement de devises n’était pas fait.051f92001a78

Si le gouvernement malgache semble vouloir lutter contre les pratiques illicites dans la filière aurifère, le paradoxe demeure entre les séries de mesures adoptées pour formaliser le secteur aurifère, sa faible contribution dans les caisses de l’État et les trafics interceptés. Ces faits amènent à poser la question suivante : quelles raisons ont favorisé l’essor des flux financiers illicites dans le secteur aurifère à Madagascar ?

Il a, par exemple, été déploré que certains maillons de la chaîne de valeur du secteur aurifère ne jouent pas leur rôle. L’or disparaît du circuit régulier une fois arrivé au niveau du collecteur qui ne dévoile jamais le nom du client à qui il vend l’or. Des orapailleurs, collecteurs et exportateurs d’or interviewés dans le cadre de l’étude affirment également que le problème provient du fait que l’État ne dispose pas de moyens pour faire appliquer la loi. Toutes ces raisons restent des hypothèses qui n’ont jamais fait l’objet d’une étude approfondie. Les travaux universitaires et empiriques réalisés ont contribué à l’analyse et la compréhension du blanchiment d’argent, de la fraude, de l’évasion fiscale et de la corruption. Toutefois, les flux financiers illicites ont été analysés suivant une approche isolée et non de façon holistique. En outre, Il n'existe pas de travaux propres pour les secteurs vulnérables dont le secteur aurifère.

Cette étude a donc pour objectif de combler ce vide et de réaliser une analyse approfondie des flux financiers illicites (FFI) relatifs au secteur de l’EMAPE aurifère à Madagascar.

Approche méthodologique pour l’identification de la typologie des risques de FFI

En s’inspirant des travaux effectués par différents experts9c411237ce3d et en prenant en compte le contexte du secteur aurifère à Madagascar, l’approche méthodologique adoptée comprenait les étapes suivantes : (i) la recension des écrits relatifs aux flux financiers illicites, (ii) l’identification des éléments générateurs de flux financiers illicites, (iii) la réalisation de descentes sur terrain dans les sites sélectionnés (Dabolava et Betsiaka), ainsi que (iv) la détermination des risques des flux financiers illicites associés à l’EMAPE aurifère à Madagascar.

Recension des écrits relatifs aux FFI

Définition des FFI

Selon un projet de recherche interdisciplinaire entrepris en 2020cad20fae528b soutenu par l’Agence suisse pour le développement et la coopération, il n’existe pas encore de consensus sur la définition des FFI. Toutefois, la littérature scientifique et les discours politiques font une distinction entre une définition « au sens strict » et une définition « au sens large » des FFI.

La première définition fait référence à une infraction à la loi (activités « illégales »). Elle renvoie à divers transferts financiers transfrontaliers illégaux, à savoir :

  • la corruption ;
  • l’exploitation illégale des ressources naturelles ;
  • la contrebande et le trafic ;
  • le blanchiment d’argent ;
  • la fraude fiscale ; et
  • la fraude commerciale internationale.87639539e53c

La seconde définition englobe les actes contraires à l’éthique (activités « illicites »). Elle fait référence aux transactions considérées comme non-éthiques même si elles ne sont pas nécessairement illégales au niveau des juridictions compétentes.

Afin de ne pas s’attarder dans des débats relatifs au concept d’éthique, la définition des FFI retenue pour ce rapport est la première définition impliquant une infraction à la loi, c’est-à-dire les activités « illégales ».

Exemples de FFI répertoriés à Madagascar

Corruption

En ce qui concerne la corruption, Transparency International Madagascar a mis en évidence en 2017 une corruption gangrenant la filière or et saphir.c2fa7a1c5ecf Dans ce rapport, ont été pointés du doigt :

  • les responsables étatiques ;
  • les collectivités territoriales décentralisées ;
  • la police des mines ;
  • les agents affectés aux inspections routières ;
  • les agents de la douane.
Blanchiment de capitaux

Entre juillet 2019 et juin 2020, le blanchiment de capitaux représentait 5 % des dossiers traités au niveau du Pôle anti-corruption (PAC), une juridiction chargée de la lutte contre la corruption. Plus de 1 800 milliards MGA ont fait l’objet d’activités de blanchiment d’argent en 2020.e0f870624167 Par ailleurs, des travaux universitaires09017aa96453 réalisés sur le blanchiment d’argent à Madagascar ont révélé différents modes opératoires tels que la déclaration de faux gains aux jeux, le financement des associations et des artistes, et la création de sociétés écrans pour un transfert d'argent à destination de l'Asie du Sud-Est.

Dans son rapport de l’année 2020, le SAMIFIN a souligné l’existence de collecteurs d’or évoluant de façon informelle et en réseau, qui spéculent et imposent les barèmes de prix au détriment des orpailleurs et des collecteurs professionnels en règle dans le secteur aurifère.

Selon le communiqué du Conseil des ministres en date de février 2022, 2 % des exportateurs d’or seulement ont effectué des rapatriements de devises.
Non-rapatriement de devises

En 2020, le ministère des Finances et du Budget à travers le service de finance externe (FINEX) a fait état, dans son rapport, de cinq dossiers relatifs au non-rapatriement de devises8d9f8d3fdec7 lié à l’exportation de l’or. Selon le communiqué du Conseil des ministres en date de février 2022, 2 % des exportateurs d’or seulement ont effectué des rapatriements de devises.23a53d6256f8

Des travaux ont récemment montré qu’entre 23 millions et 247 millions USD de recettes d'exportation aurifères imposables sont perdus à cause des exportations illicites et de la fraude fiscale.d7e3f8916b76

Identification des facteurs générateurs de FFI

Les facteurs générateurs de FFI sont des faits et circonstances nourrissant et favorisant les flux financiers illicites. Les facteurs générateurs ont été identifiés en constatant la différence entre les éléments théoriques qui régissent le secteur aurifère à Madagascar et les pratiques des acteurs dans l’exercice de leurs activités (Tableau 1).

Tableau 1 : Facteurs générateurs de FFI

Composantes des FFI

Éléments constitutifs

Facteurs générateurs de FFI

Corruption

 

Loi n° 2016-020 sur la lutte contre la corruption à Madagascar, entre autres :

  • Favoritisme (Art19)
  • Corruption passive (Art21)
  • Corruption active (Art23)
  • Trafic d’influence (Art25)
  • Abus de fonctions (Art26)
  • Interférence de personnes politiquement exposées (PPE) et agents publics le long de la chaîne de valeur aurifère.
  • Conflit d’intérêts des agents publics, cumul de fonctions juge et partie : fonctionnaire de l’administration et sponsor de l’extraction aurifère.
  • Dysfonctionnement de l’administration minière : manque de suivi des responsables étatiques le long de la chaîne de valeur.
  • Vide juridique dans les textes miniers : le Code minier est en déphasage avec les pratiques sur le terrain (par exemple, pratique du livret de Bokim-patana).

Blanchiment de capitaux

Article 1er de la loi n° 2018-043 du 13 février 2019 :

  • Conversion ou transfert de biens dans le but de dissimuler ou déguiser l’origine illicite des biens ou d’aider toute personne qui est impliquée dans la commission de l’infraction principale à échapper aux conséquences juridiques de ses actes
  • Dissimulation ou déguisement de la nature, de l’origine, de l’emplacement, de la disposition, du mouvement de la propriété – celle des biens ou de droits y relatifs – par toute personne en sachant que ceux-ci proviennent d’un crime ou délit ou d’une participation à un crime ou délit
  • Acquisition, détention ou utilisation de biens par toute personne en sachant que ceux-ci proviennent d’un crime ou délit ou d’une participation à un crime ou délit
  • Paiements et transactions le long de la chaîne de valeur de l’or s’effectuent en espèces. Opacité au niveau des transactions.
  • L’opération d’achat, vente et partage de production d’or se déroule à l’abri des regards. Aucune tierce partie ne peut ni vérifier ni contrôler les activités relatives à l’or. 
  • Dysfonctionnement de l’administration minière.
  • Faible taux de pénétration bancaire, non-respect de l’obligation de signalement d’activité ou transaction douteuse.

 

La fraude fiscale

 

Selon le Code minier, loi n° 99-022 du 30 juillet 1999, révisée en 2005 portant « Loi n° 2005-021 du 17 octobre 2005 », toute tentative des acteurs (collecteurs, comptoir d’or, orpailleurs, société exportatrice d’or) de se soustraire à leurs obligations :

  • de payer la redevance minière à l’État (payer l’impôt), la redevance de 2 % de la valeur du produit à la première vente
  • de payer la carte professionnelle : carte orpailleur, carte collecteur, carte statistique
  • de payer un impôt synthétique (IS) ou impôt sur les revenus selon le Code général des impôts
  • de déclarer leur production auprès de l’autorité qui leur a délivré l’autorisation selon le Code minier en vigueur et le décret portant régime de l’or
  • de disposer de document d’autorisation pour le transport de l’or
  • Vide juridique pour l’extraction dans des sites non prévus par la loi.
  • Centralisation de l’exportation de l’or.
  • Dysfonctionnement de l’administration fiscale.
  • Différence de traitement entre les acteurs qui payent leurs taxes et ceux qui évitent de payer leurs impôts.
  • Le taux élevé de l’impôt, ainsi que la progressivité trop rapide de ce dernier découragent le contribuable à respecter ses obligations : carte professionnelle, impôt sur le revenu.
  • La présence de lacunes, d’imprécisions et d’autres failles de la loi fiscale facilitant la fraude fiscale.

Évasion fiscale

Selon l’arrêté n° 16274/2016 du 29 juillet 2016 portant procédures de domiciliation et de règlement des opérations d’exportation et de l’arrêté n° 13312/2015 du 2 avril 2015 portant procédures et obligations en matière de domiciliation et de paiement des opérations d’importation de marchandises : Action de fuir des obligations de payer l’impôt et contourner la loi en cherchant ses failles.

Dans le cadre du secteur aurifère, les acteurs tentent d’échapper à leurs obligations légales :

  • de rapatrier leurs devises après l’exportation de l’or selon ces arrêtés
  • de payer la redevance minière pour l’exploitation d’or et autres taxes et impôts (impôt sur le revenu, TVA.) selon le Code minier et Code général des impôts
  • Une société exportatrice d’origine étrangère crée ses filiales à Madagascar en ne respectant pas les conditions de création : adresse physique complète, structure organisationnelle.

Source : Auteurs de l’étude, 2022

Collecte des données

Afin de confirmer ou d’infirmer la typologie et l’ampleur des risques de FFI, une collecte des données sur deux sites sélectionnés a été menée dans les régions Menabe et Diana où l’activité aurifère est suffisamment ancrée.

Dans la région Menabe, située au sud-ouest de Madagascar, cette collecte s’est déroulée dans la commune de Dabolava, Miandrivazo chef de district, et de Morondava, chef-lieu de région, du 15 au 22 août 2021.

Pour la région Diana au nord de Madagascar, la collecte a été réalisée dans la commune rurale de Betsiaka, Ambilobe chef-lieu de district, et d’Antsiranana, chef-lieu de région, du 28 août au 6 septembre 2021.

Enfin, une collecte des données a été effectuée dans la capitale Antananarivo qui abrite les sièges de plusieurs institutions concernées par le secteur aurifère.

Entretien avec les acteurs directs

Un entretien libre et des focus group ont été privilégiés pour les acteurs directs tels que les collecteurs, les orpailleurs, les bijoutiers et les exportateurs d’or. Pour Dabolava, 3 séances de focus group ont été organisées, chacune pour 40 orpailleurs. Pour Betsiaka, 4 séances de focus group pour 30 orpailleurs chacune. Dans les deux cas, la majorité des participants étaient des femmes.

Afin d’obtenir des résultats d’étude respectueux des principes de validation scientifique :

  • un échantillonnage spatial a été appliqué sur la base du répertoire et des données synoptiques rassemblées au sein des sites pilotes concernés ;
  • la liste de l’échantillon des acteurs directs a été ressortie à travers la méthode aléatoire basée sur un taux de sondage de 50 % de la population mère. Cette approche a été appliquée notamment aux collecteurs et exportateurs pour obtenir davantage de représentativité ;
  • l’enquête a été effectuée sur la base de la liste des collecteurs établie par la commune de Betsiaka et Dabolava en collaboration avec l’ANOR ;
  • quant aux orpailleurs, le tirage a été fait sur la base des données des orpailleurs disponibles dans la commune concernée ;
  • étant donné la durée limitée de l’enquête, deux couloirs d’orpaillage et deux fatana (roche) pour chaque site pilote ont été choisis.

Pour ces deux régions pilotes, 98 collecteurs, 5 exportateurs et 200 orpailleurs ont fait l’objet d’un entretien.

Entretien avec les acteurs indirects

En ce qui concerne les acteurs indirects tels que les institutions étatiques à tous les niveaux et les organisations de la société civile, la collecte des données a été faite à travers un entretien semi-directif en utilisant un guide d’entretien spécifique. La collecte des données s’est focalisée sur les différentes pratiques illégales et légales qui touchent la chaîne de valeur de la filière aurifère à Madagascar.

Weighing out gold on a pair of scales.

Pesage de poudre d'or apportée par un orpailleur au près d'un collecteur de catégorie I, Dabolova, Menabe – Madagascar

Credit: Daniel Rabemazava copyrighted

Outil d’analyse des risques de FFI

Il s’agissait, ensuite, de faire ressortir les risques de FFI dans le secteur aurifère. Pour ce faire, pour chaque maillon de la chaîne de valeur, les faits et les données collectés sur le terrain, la recension des écrits, les éléments constitutifs et les facteurs générateurs de FFI ont été croisés.

Une fois que les faits et les données collectés sur le terrain ont été rassemblés, ils ont été analysés par rapport aux différents points suivants :

  • Les pratiques observées sur le terrain pour chaque maillon de la chaîne de valeur se rapportent-elles à des éléments constitutifs de FFI ?
  • Des facteurs générateurs de FFI observés parmi les faits et données collectés favorisant des FFI existent-ils ?
  • Les FFI dénoncés sont-ils confirmés par plusieurs acteurs sur le terrain ?
  • Les FFI dénoncés sont-ils déjà repris et cités dans la littérature (rapport, article de presse, ouvrage) ?

Limites de l’étude

Compte tenu du facteur temps et des ressources allouées à la réalisation de l’étude, une priorisation des zones d’études a été effectuée. Par ailleurs, il est à considérer que les informations font souvent défaut auprès des institutions étatiques et des acteurs privés en raison de la sensibilité du sujet traité.

La chaîne de valeur (théorique) de l’or à Madagascar

La filière or est actuellement régie par le Code minier relatif à la loi n° 2005-021 du 17 octobre 2005 et ses textes subséquents dont le décret n° 2006-910 du 19 décembre 2006 fixant ses modalités d’application ainsi que le décret n° 2015-1035 du 30 juin 2015 portant Régime de l’or.

Dans le cadre de l’exploitation minière artisanale et à petite échelle (EMAPE), le cadre régissant la filière or reconnaît deux types d’exploitation : l’exploitation dans les carrés miniers que confèrent les permis miniers réservés aux petits exploitants, et l’exploitation de l’or dans des couloirs d’orpaillage. Le Code minier dispose que les petits exploitants doivent se limiter à l’utilisation des techniques artisanales dans l’exécution de leurs travaux de recherche et/ou d’exploitation minière, sans définir ce que sont ces techniques artisanales. Mais l’Arrêté 7903/2013 autorise l’exploitation artisanale manuelle et mécanisée de l’or. Il existe de fait une incohérence entre le Code minier et l’Arrêté

La chaîne de valeur de l’or comporte les phases suivantes :

  • la phase administrative ;
  • la phase d’installation ;
  • la phase d’exploitation ;
  • la phase de transport ;
  • la phase de commercialisation ou de collecte ;
  • la phase de transformation ; et
  • la phase d’exportation.

Hormis la phase d’exploitation et la phase de commercialisation où il y a une légère différence pour les titulaires d’un permis minier et les titulaires des cartes d’orpailleurs, toutes les autres étapes sont identiques.

Phase administrative

Lors de cette phase, un permis minier réservé aux petits exploitants (PRE) ou une carte d’orpailleur est délivrée.

Permis minier réservé aux petits exploitants (PRE)

Les permis miniers réservés aux petits exploitants sont octroyés par le Directeur interrégional du ministère chargé des mines, territorialement compétent, mais leur délivrance revient au Bureau des cadastres miniers de Madagascar après le paiement, par le demandeur, des frais annuels d'administration minière par carré y afférents.0dcbfe119cf2 Seules les personnes physiques de nationalité malgache et les groupements légalement constitués d'individus de nationalité malgache, utilisant des techniques artisanales, peuvent acquérir et détenir des PRE. La durée de validité de ce permis est de huit ans, il est renouvelable une ou plusieurs fois pour une durée de quatre ans à chaque renouvellement.

Carte d’orpailleur

L’activité d’orpaillage est réservée au titulaire d’une carte d’orpailleur délivrée par les communes concernées, qu’il soit un petit exploitant national individuel ou un groupement de petits exploitants nationaux légalement constitué. La durée de validité de la carte d’orpailleur est de 12 mois, renouvelable une ou plusieurs fois pour la même durée, sous réserve du paiement du droit y afférent.

Les cartes d'orpailleurs sont enregistrées dans un registre spécial tenu à jour par chaque commune qui les délivre. En outre, la commune de délivrance a pour obligation :

  • de tenir les registres de production ;
  • de désigner un responsable permanent par site d’orpaillage pour le suivi des activités des orpailleurs de sa circonscription ;
  • d’adresser, chaque trimestre, une liste des orpailleurs en activité dans sa circonscription au bureau de l’Agence nationale de la filière or (ANOR). L’ANOR est chargée de fournir l'assistance technique ainsi que de dispenser la formation adéquate aux orpailleurs et aux collectivités territoriales décentralisées. Par ailleurs, elle est habilitée à effectuer toute opération visant la collecte des informations nécessaires pour une maîtrise de l'activité aurifère.

En outre, pour exercer une activité formelle, un entrepreneur doit au moins posséder une carte statistique et payer l’impôt en fonction de son chiffre d’affaires. Ainsi, le titulaire d’un PRE ou d’une carte d’orpailleur doit posséder une carte statistique d’un montant de 20 000 MGA (5 USD) et payer l’impôt synthétique (IS) minimum de 16 000 MGA/an (4 USD/an). Il convient cependant de préciser que le PRE et la carte d’orpailleur ne donnent pas les mêmes droits et obligations à leurs propriétaires.

Le cadre régissant la filière or reconnaît deux types d’exploitation : l’exploitation dans les carrés miniers que confèrent les permis miniers réservés aux petits exploitants, et l’exploitation de l’or dans des couloirs d’orpaillage.

Phase d’installation

Titulaire du PRE

Avant le commencement des travaux de prospection, de recherche et d’exploitation aurifère, le titulaire du PRE doit produire un plan d'engagement environnemental qui sera approuvé par le service chargé de l'environnement minier du ministère chargé des mines. Il doit ensuite se présenter au niveau des autorités des collectivités territoriales décentralisées avec les documents nécessaires, comme le permis minier et le plan d’engagement environnemental.

Titulaire de la carte d’orpailleur

Le titulaire de la carte d’orpailleur est, quant à lui, tenu au respect des obligations environnementales fixées par les autorités de la commune de délivrance. Tout titulaire de carte d’orpailleur paie, au profit de la commune de délivrance, une cotisation environnementale qui est incluse dans le droit d’octroi, et s’engage à effectuer des travaux de prévention et de réhabilitation environnementales sur les sites d’orpaillage conformément aux programmes établis par la commune.

Phase d’exploitation

Pour le titulaire d’un PRE

Le PRE confère le droit d’entreprendre des travaux de prospection, de recherche et d’exploitation à l'intérieur d’un périmètre délimité, appartenant légalement soit au titulaire même du PRE, soit à une tierce personne. La superficie totale de ce périmètre est limitée à 100 km², soit 256 carrés miniers.

L’opérateur titulaire du PRE doit conclure un contrat de bail et/ou une compensation avec le titulaire de la propriété suivant les articles du Code minier de 2005 (articles 39, 125 et 126). En effet, un permis minier n’est jamais l’équivalent d’un titre foncier. Si le propriétaire ne se manifeste pas dans les quatre mois qui suivent, il perd ses droits d’être indemnisé selon l’article 325 du décret d’application du Code minier. Dans le cas où il n’y a pas d’accord entre le titulaire du permis minier et le propriétaire, une médiation au niveau de la commune est mise en place par le Comité national des mines selon les articles 124, 124-1 au 124-3 du Code minier de 2005.

Pour l’extraction et le traitement des substances minérales du sol ou du sous-sol, le titulaire du PRE utilise des outils manuels, la force humaine ou animale, ainsi que des équipements mécanisés, autorisés sans transformation de l’or sur le lieu de l’extraction. Il a le droit de construire les infrastructures nécessaires à l’exploitation aurifère et d'utiliser le bois et les eaux qui se trouvent dans le périmètre conformément aux lois et règlements en vigueur. Les visites effectuées sur les sites d’exploitation ainsi que l’étude des rapports fournis par les titulaires du PRE permettent à la Direction de la police des mines – organe chargé de l’inspection des mines –,avec les collectivités territoriales décentralisées d’assurer le suivi de l’exécution des obligations incombant aux titulaires de permis miniers. Les documents et les rapports que le titulaire du PRE doit tenir à jour sont notamment :

  • le journal de chantier dans lequel sont consignés les événements survenus à l’intérieur de la zone d’activité ;
  • un registre d’extraction et de vente ;
  • un rapport d’activité ;
  • les documents comptables.

Pour le titulaire de la carte d’orpailleur

La carte d’orpailleur est valable sur tous les couloirs d’orpaillage situés à l’intérieur de la circonscription de la commune qui l’a délivrée. Mais aucun orpailleur ne peut prétendre à une exclusivité quelconque dans un couloir d’orpaillage. À noter que les couloirs d’orpaillage sont délimités de façon précise, de visu et in situ, et sont utilisés à la fois par les orpailleurs/groupements d’orpailleurs, les titulaires du permis minier concerné et la commune, avec l’assistance éventuelle de la Direction interrégionale des mines, du Bureau du cadastre minier et de l’ANOR.

Par ailleurs, la carte d’orpailleur est personnelle : elle ne peut être ni cédée ni mutée ni amodiée sous quelque forme que ce soit. Un accord entre les détenteurs des cartes d’orpailleur et les titulaires des PRE doit être établi dans le cas où le terrain objet des futures exploitations s’avère être le même. Dans ce sens, une note communale est affichée en permanence au bureau de la commune. Toutefois, tout orpailleur ou groupement d'orpailleurs régulièrement constitué peut accéder à un permis minier si le périmètre est libre de tout droit. L’orpailleur s'acquitte d'un droit, au profit de la commune concernée, pour l'octroi de l’autorisation d'orpaillage et l'obtention de la carte d'orpailleur.

Phase de transport

Lorsque l’or est transporté, avant sa première vente, hors du périmètre délimité par le PRE ou du couloir d’orpaillage (c’est-à-dire transporté dans d’autres régions), un laissez-passer dûment rempli, daté et signé doit être obtenu par le titulaire ou son mandataire, et doit indiquer la destination de l’or.

Le laissez-passer est un document conçu par la Direction régionale des mines afin de faciliter le suivi des produits extraits durant tout leur parcours, c'est-à-dire de la mine au lieu de transformation, à la vente ou l’exportation. Il se présente sous la forme d’un carnet comprenant 50 feuillets cotés et paraphés par l’autorité compétente auprès de la direction des mines.

Il existe trois types de laissez-passer :

  • Laissez-passer de type 1 : il est détenu par les titulaires du PRE. Il est utilisé pour le transfert de la production des sites d’exploitation aux éventuels sites de transformation ou vente/exportation. Tout transport de produits miniers doit être accompagné d’un laissez-passer de type 1 approprié, faute de quoi, le transport est considéré comme étant illégal par les autorités.
  • Laissez-passer de type 2 : il est détenu par les transformateurs pour justifier la possession et le transport de l’or transformé.
  • Laissez-passer de type 3 : il est réservé aux exportateurs et figure comme document inévitable pour pouvoir procéder aux formalités d’exportation.
Le laissez-passer facilite le suivi et le transport de l’or. Sans laissez-passer approprié, le transport serait considéré comme étant illégal.

Phase de commercialisation

Circuit suivi par le titulaire d’un PRE

À la première vente, le prix est établi de gré à gré en marché libre entre le titulaire du permis minier et l’acheteur. Cette vente donne lieu à une facture conjointement signée par le titulaire ou son mandataire et l’acheteur, ainsi qu’à la perception d’une redevance minière et d’une ristourne dont les montants respectifs sont équivalents à 0,60 % et 1,40 % de la valeur de l’or vendu.

L’or extrait du périmètre délimité par le PRE peut être vendu au comptoir de l’or agréé, sous réserve de la présentation d’une facture.

Le comptoir de l’or est soit un comptoir commercial, soit un comptoir de fonte :

  • le comptoir commercial a pour objet l’achat et la vente, y compris la collecte de l’or ;
  • le comptoir de fonte s’occupe du traitement de l’or conformément aux normes internationaleset peut le commercialiser sur le territoire national ou l’exporter.

Le comptoir de l’or agréé détient un registre des entrées et sorties, paraphé par le chef du service compétent de la Direction des mines et de la géologie du ministère chargé des mines, ou par le Directeur interrégional du ministère chargé des mines territorialement compétent.

Circuit suivi par le titulaire d’une carte d’orpailleur

L’orpailleur vend sa production au collecteur agrée. Une personne désirant obtenir la carte de collecteur devra au préalable s’inscrire à l’ANOR. La demande d'octroi de la carte de collecteur d'or est déposée auprès du bureau de la commune concernée qui dresse un registre spécial tenu à jour et dont la communication périodique doit être faite à l'autorité compétente de la région et à l’ANOR.

Le collecteur agréé :
  • est une personne physique munie d'une carte de collecteur délivrée par la commune dont la durée de validité est de 1 an ;
  • est autorisé à acheter l'or auprès des orpailleurs ou des groupements locaux d'orpailleurs ;
  • est enregistré sur un registre spécial tenu à jour par chaque commune qui en dresse un état ;
  • adresse à l’ANOR un rapport semestriel d'activité ;
  • est redevable de la redevance minière sur les quantités d'or collectées.
La carte de collecteur :
  • est accordée individuellement aux personnes physiques de nationalité malgache ou étrangère résidant à Madagascar et titulaires de cartes professionnelles ou de cartes d’affiliation à un comptoir de l’or agréé en cours de validité ;
  • est renouvelable une ou plusieurs fois pour la même durée, sans nouvelle instruction et moyennant paiement du même droit payé lors de l’octroi initial auprès de la commune concernée sous réserve de l'acquittement des impôts et taxes professionnelles y afférents auprès des services fiscaux compétents ;
  • est rigoureusement personnelle. Elle ne peut être ni cédée ni mutée ni amodiée sous quelque forme que ce soit.

Il est à noter qu’une personne physique peut se faire délivrer une ou plusieurs cartes de collecteurs valables pour d’autres communes.

On distingue deux types de cartes de collecteurs :

  • la catégorie 1 regroupe les collecteurs exerçant dans le Fokontany47ea7ee98345 même où ils résident. Les cartes de collecteurs catégorie 1 sont attribuées aux communes qui se chargent de leurs ventes auprès des opérateurs ;
  • la catégorie 2 regroupe les collecteurs autorisés à exercer leur activité dans les communes. Les cartes de collecteurs catégorie 2 sont délivrées par l'ANOR.

Phase de transformation

La fonte de l’or est assurée par le comptoir de fonte détenant un agrément suivant l’Arrêté du ministre chargé des mines et délivré par l’ANOR sur présentation par le bénéficiaire de la quittance attestant du paiement du droit d’octroi. Le comptoir de fonte agréé est autorisé à acheter l’or auprès des orpailleurs, des collecteurs agréés, des titulaires de permis miniers autorisés, dont le PRE, et auprès d’autres comptoirs d’or à Madagascar. L’or fait ensuite l’objet d’un poinçonnage obligatoire selon l’article 153 du Code minier. L’opération est effectuée par le laboratoire chargé des analyses minières ou des experts privés préalablement agréés.

Phase d’exportation

En application des dispositions de l’article 148-1 du Code minier, l’exportation de l’or doit se faire sous forme de bijoux ou sous forme semi-ouvrée telle que pièce ou lingot. Par ailleurs, les exportations de substances minérales sont soumises à la réglementation sur le rapatriement des devises.e6a75ab413a1 À Madagascar, le guichet unique, ayant pour objectif de faciliter les procédures d’exportation minière et d’éliminer les fraudes dans les exportations, gère le processus d’exportation de l’or.

La procédure d’exportation de l’or à Madagascar comprend différentes étapes.

Déclaration à l’ANOR

Toute personne physique ou morale dûment autorisée qui voudrait exporter de l’or doit passer par l’ANOR pour faire sa déclaration et viser ses registres.

Contrôle des métaux précieux

En application des dispositions de l’article 149 nouveau du Code minier, les métaux précieux destinés à l’exportation font l’objet d’un contrôle de leur nature, de leur qualité et de leur granulométrie par un laboratoire d’analyse minière avant leur expédition. L’exportateur doit remplir la fiche signalétique correspondante. Outre le laboratoire national des mines délivrant au déclarant une attestation d’analyse de qualité, des laboratoires ainsi que des experts indépendants spécialisés peuvent être agréés par le ministère chargé des mines pour faire les contrôles de qualité requis.

Contrôle de prix

La division d’exportation minière effectue une constatation et un contrôle de prix suivant l’appréciation du laboratoire ou de l’expert indépendant sur la base de la fiche de contrôle des métaux précieux, la fiche signalétique et la facture pro forma. Le dossier doit être domicilié à la Banque de l’exportateur pour l’enregistrement de l’exportation et de sa valeur selon le poids et le prix de référence de l’or. Si la valeur proposée sur la facture pro forma est minorée, l’agent compétent du service procède à un réajustement suivant la valeur de référence.

Soumission du dossier à la DGAM

L’exportateur doit ensuite soumettre son dossier d’exportation à la Direction de la gestion des activités minières (DGAM). La DGAM enregistre les dossiers de recevabilité composés de la fiche de contrôle des métaux précieux, la fiche signalétique, la facture domiciliée, les laissez-passer réglementaires dûment remplis et correspondant aux substances à exporter, notamment le laissez-passer (LP) type 3 ou modèle IIIE et le laissez-passer d’origine de l’or : LP I pour les permissionnaires, LP II pour les transformateurs et LP III pour les commerçants ou le certificat d’origine pour la provenance de l’orpaillage, ou les factures d’achat y afférentes.

Vérification par le service des mines

Le service des mines assure la vérification des dossiers soumis en consultant la facture domiciliée, le laissez-passer modèle IIIE, le certificat d’origine, la fiche de contrôle des métaux précieux et la fiche signalétique.

Puis, en présence des représentants des services des mines, de la douane, de la gendarmerie et du laboratoire d’analyse minière, il est réalisé conjointement dans la salle de scellage une constatation de la conformité et le scellage du colis. Un procès-verbal de constatation et de scellage ainsi qu’un procès-verbal de pesage est établi et délivré à l’exportateur.

Paiement de la redevance

Si aucune réserve n’est émise, la DGAM calcule les redevances et ristournes minières dans le cas où l’exportateur ne présente pas la quittance de paiement de la redevance et ristourne afin que l’exportateur s’acquitte de ces montants. Outre le paiement de la redevance et ristourne, il est demandé également à l’exportateur de payer le droit de délivrance du certificat de conformité qui constitue l'acte administratif unique requis pour la sortie du territoire national de l’or. Son coût est de 100 000 MGA (environ 24 USD) par certificat de conformité pour un envoi inférieur à 50 000 000 MGA (environ 12 000 USD) et 0,2 % de la valeur déclarée pour envoi supérieur ou égale à 50 000 000 MGA (environ 12 000 USD). Après la constatation des paiements susmentionnés, la DGAM délivre le certificat de conformité.

Contrôle douanier

Le service des douanes effectue les formalités de contrôle douanier dont les pièces exigées sont une fiche de déclaration douanière unique, un certificat de conformité, un procès-verbal de scellage, de contrôle et de constatation, et une photocopie du billet et passeport.

Organisation du transport

Enfin, l’exportateur est libre d’organiser le transport du colis jusqu’à sa destination.

Looking for gold in a river nearby a village.

Tamisage du sable d'une mare par un orpailleur pour trouver de l'or (Diana, Betsiaka, secteur de Mantelimara).

Credit: Daniel Rabemazava copyrighted

La chaîne de valeur de l’or à Madagascar : en pratique

Dans le cadre de l’exploitation minière artisanale et à petite échelle (EMAPE) aurifère à Madagascar, notamment dans la commune de Betsiaka et Dabolava, il existe trois zones d’exploitation de l’or artisanale : la première se trouve dans les couloirs d’orpaillage qui sont les lits vifs et 20 mètres de part et d’autre du cours d’eau ; la deuxième, dans les gisements éluvionnaires sur les collines « filon-terre » ; et la troisième dans les fatana, les « filons en roche mère ». L’analyse menée dans la commune de Betsiaka et Dabolava a permis de confronter la chaîne de valeur de l’or prévue par la loi (chapitre précédent) à la pratique, mettant en lumière de nombreuses différences.

Phase administrative : entre permis miniers, autorisations d’orpaillage et livret de fatana

Le permis minier réservé aux petits exploitants (PRE)

D’après le Bureau du cadastre minier de Madagascar (BCMM), le nombre de PRE valides sur tout le territoire malgache est de 1 467 en 2018.

Depuis le second semestre 2010, le secteur minier fait l’objet d’un gel de l’octroi de permis (note de Conseil n° 34/2011-PM/SGG/SC signée par le secrétaire général du gouvernement, en date du 6 avril 2011 annonçant le gel de l’octroi des permis miniers et renouvelé par la Note du gouvernement 002/2014). Pour les PRE plus particulièrement, la lettre n° 682/MMH signée par le ministre des Mines et des Hydrocarbures le 31 mai 2011 suspend l’octroi de nouveaux PRE.

Transparency International Madagascar affirme, dans son étude publiée en 2020 sur les risques de corruption dans l’octroi des permis miniers à Madagascar, que le gel de l’octroi des permis miniers favorise les risques de corruption, notamment dans les interférences politiques et le paiement des pots-de-vin pour accélérer l’octroi des permis miniers.

La carte d’orpailleur

Contrairement aux permis miniers, les autorisations d’orpaillage ne font pas l’objet d’une suspension d’octroi.

En 2021, sur les 39 991 cartes d’orpailleurs délivrées par l’ANOR réparties sur les 186 communes, 4 500 et 3 264 ont été délivrées respectivement dans la région de Diana et la région de Menabe.

Il faut savoir que sur les 200 orpailleurs et orpailleurs-creuseurs interviewés, 1 % seulement est enregistré au niveau du centre fiscal. À noter qu’ils refusent de payer les différents impôts auxquels ils sont assujettis en raison de leur faible revenu, leur revenu ne dépassant pas 8 000 MGA/jour (2 USD).

Le cas du livret de fatana

De manière générale, le Code minier (et ses textes subséquents) ne reconnaît que deux types d’exploitations aurifères : l’exploitation dans des carrés miniers que confèrent les permis miniers, et l’exploitation dans des couloirs d’orpaillage autorisée par la carte d’orpaillage. L’enquête menée sur les sites de Dabolava et Betsiaka montre qu’un autre type d’exploitation a lieu : l’extraction des roches souterraines avec creusage et bois de chauffe ou fatana.

Afin de coordonner l’exploitation d’or et percevoir des droits sur cette activité minière, les autorités communales ont conçu un livret de fatana. Elles le délivrent à un titulaire qui peut alors exploiter l’or dans les fatana. Même si le livret de fatana est le fruit d’une organisation locale, sa délivrance est sans base légale.

Ce livret renferme les descriptions du site, le lieu, le nom de la colline, les membres de l’équipe de travail et la production. Il est vérifié et validé par un comité d’évaluation de fatana ou « komity mpitsara fatana » pour assurer qu’il n’y a aucun empiètement entre les fatana et éviter les litiges. Le comité d’évaluation de fatana est composé du comité exécutif du Dina et de conseillers communaux.

La possession de ce livret, qui n’a pas mention d’un registre de production d’or, peut donner une fausse interprétation que les creuseurs-orpailleurs n’ont pas besoin de déclarer leur production.

L’exploitation aurifère par extraction rocheuse n’étant pas prévue par la loi, aucun impôt n’est associé à cette forme d’exploitation. D’après les résultats de nos collectes de données, il y a 200 fatana dans la commune de Dabolava, pour la région Menabe, dont 125 en cours d’exploitation, et 985 fatana dans la commune rurale de Betsiaka, faisant partie de la région de Diana, dont 486 en cours d’exploitation

Pour obtenir un livret de fatana :

  • dans la commune de Betsiaka, l’exploitant doit payer 90 000 MGA (22,5 USD) répartis en 70 000 MGA (17 USD) pour le comité exécutif du Dina, 10 000 MGA (2,5 USD) pour la commune et 10 000 MGA (2,5 USD) pour le Fokontany concerné ;878d678a4731
  • dans la commune de Dabolava, l’exploitant paie directement à la commune un droit d’acquisition du livret de fatana d’un montant de 100 000 MGA (environ 24 USD) par an.5f00282627e1

Les services des mines et du BCMM ne font pas partie des bénéficiaires de ces transactions.

Phase d’exploitation : entre couloir d’orpaillage et fatana

Couloir d’orpaillage

L’enquête menée dans les sites de Dabolava et de Betsiaka montre que la recherche d’or dans les couloirs d’orpaillage se fait par l’utilisation d’une bâtée, qui ne demande pas d’effort physique. La plupart des orpailleurs dans ces sites sont des paysans qui ne possèdent pas de terre et vivent dans des conditions de vie précaires. L’orpaillage est leur principale activité et leur production journalière varie de 0,5 à 1 décigramme/jour, pour un revenu moyen entre 8 000 MGA (2 USD) à 16 000 MGA (4 USD) par jour. Le revenu journalier de l’orpailleur est uniquement utilisé pour l’achat de produits de première nécessité. Les entretiens réalisés avec les orpailleurs montrent que certains orpailleurs travaillent pour le compte des titulaires de livrets de fatana.

Fatana

Ceux qui souhaitent exploiter un éventuel filon en roche mère doivent prendre contact avec le propriétaire du terrain où se situe le filon en question avant toute activité de creusage et d’extraction d’or. Les deux parties doivent trouver un compromis à l’issue duquel le propriétaire du terrain permet au titulaire du livret de fatana d’exploiter le filon en roche mère situé sur son terrain. Ce compromis est conclu par un accord verbal par lequel le titulaire du livret de fatana accepte de verser, en général, un tiers de la production d’or au propriétaire du terrain concerné. Cependant, il est fréquent que des litiges relatifs à la modification du partage des parts éclatent entre le titulaire du livret de fatana et le propriétaire du terrain. En effet, le titulaire du livret de fatana essaie parfois de se soustraire à son obligation pour diminuer la part de production qu’il a accepté de verser au propriétaire du terrain.

Dès que les deux parties trouvent un terrain d’entente, l’exploitation du fatana peut commencer. Cette exploitation se fait avec barre à mine, coupe-coupe, bêche, burins, pelle, masse, et motopompe pour évacuer les eaux souterraines. Cinq à dix ouvriers/creuseurs/orpailleurs commencent les travaux en faisant un trou de 30 à 50 mètres de profondeur. Ils peuvent atteindre un filon moyen à 30 mètres de profondeur. Dès que les pierres contenant de l’or sont extraites, les travailleurs se livrent au broyage des minéraux et au tamisage, puis les lavent auprès des sources d’eau les plus proches. Pour séparer l’or de la terre et des pierres, les mineurs n’utilisent pas de liquides de séparation pouvant affecter la qualité de l’eau, comme les mercures ou les cyanures.

L’enquête effectuée sur les sites de Dabolava et de Betsiaka montre que la majorité d’or produite, dont la quantité varie de 100 grammes à 1 kilo par mois, est issue des fatana. D’après les acteurs interrogés, notamment les orpailleurs creuseurs, il est rare que cette production soit frappée de la redevance de 2 % de la valeur du produit à la première vente.

Rôle des sponsors dans les fatana

L’entretien d’un fatana nécessite un gros investissement en termes de matériel et de rations alimentaires journalières pour les travailleurs. D’où la présence de sponsors ou de personnes qui financent l’exploitation des fatana, notamment par l’achat de matériels d’exploitation et la mise à disposition des rations alimentaires journalières.

Les enquêtes menées sur les sites de Dabolava et de Betsiaka ont permis d’établir l’existence de sponsors indépendants et de sponsors ayant été financés par un intermédiaire :

  • Les sponsors indépendants engagent leurs fonds propres pour fournir du matériel de creusage et des rations alimentaires pour les orpailleurs. Ces sponsors se verront alors octroyer une part de la production lorsque le fatana commencera à produire. Cependant, ce type de sponsors se raréfie car le travail de creusage pour atteindre les filons peut parfois prendre plusieurs mois. Le coût d’investissement est plus important que les bénéfices et il arrive que leurs moyens de financement se tarissent avant que la phase d’extraction ne commence.
  • Le deuxième type de sponsors est composé de personnes ayant, pour la plupart, reçu un financement d’un intermédiaire. Comme les sponsors indépendants, ce deuxième type de sponsors fournit également du matériel et des rations alimentaires soit aux orpailleurs, soit au propriétaire du fatana qui les redistribue aux orpailleurs. En contrepartie, toute production d’or est directement collectée par ces sponsors ou par leurs collègues collecteurs catégorie 1 qui leur sont affiliés. La valeur des matériels et rations mis à disposition est directement retenue sur les productions récoltées afin de les rembourser.

Deux titulaires de livret de fatana interviewés sur le site de Betsiaka et Dabolava rapportent que le coût opératoire mensuel dépensé au niveau des fatana est estimé à 12 millions MGA (3 000 USD) et le coût d’investissement (achat de groupe électrogène, motopompe) s’élève jusqu’à 30 millions MGA (7 500 USD).

À noter qu’aucun dispositif d’enregistrement et de déclaration n’est mis en place lors de cette opération. Dans le Code minier, il n’est pas prévu que les sponsors fassent une déclaration de production étant donné le vide juridique existant autour des fatana.

Encadré 1 : Résumé d’entretiens avec des orpailleurs de Dabolava et Bestiaka sur le partage de production d’or

« Comme ils nous fournissent du matériel et des rations pour travailler que nous ne pouvons directement payer, on doit leur rapporter notre production d’or. Ils retiennent, sur l’or que nous récoltons, l’équivalent pour rembourser les matériels et rations qu’ils nous ont donnés. Ils fixent également la valeur de l’or. Il ne nous reste plus beaucoup d’or à revendre en fin de semaine. Il nous reste juste suffisamment pour pouvoir envoyer nos enfants à l’école. Mais avec le début de la raréfaction d’or, la baisse de la valeur de l’or et l’augmentation du prix des matériels et des rations, cela commence à devenir difficile », rapportent plus d’une dizaine d’orpailleurs à Dabolava et Betsiaka durant l’enquête (entretiens réalisés du 21 au 26 août 2021 pour Dabolava et du 28 août au 6 septembre 2021 pour Betsiaka).

D’après les personnes interviewées, notamment les orpailleurs creuseurs et les collecteurs, ces sponsors sont des officiers généraux de la gendarmerie, de la police nationale et de l’armée, des hauts responsables du tribunal et des opérateurs qui sont en étroite relation avec les autorités politiques en place. Les collecteurs, qui sont en majorité des opérateurs privés, travaillent en étroite collaboration avec ces sponsors pour faciliter la commercialisation de l’or. Ces sponsors sont réputés recevoir des fonds issus d’intermédiaires implantés dans la capitale. Ces intermédiaires/négociants auraient des liens avec des investisseurs à l’étranger.

Protection apportées par les autorités publiques dans les fatana

Des cas d’accaparement de fatana, en complicité avec les forces de l’ordre et les autorités locales, ont été signalés par les orpailleurs durant les enquêtes sur les deux sites. Les propriétaires des fatana s’associeraient le plus souvent avec les forces de l’ordre et les autorités locales pour avoir leur protection, en contrepartie d’une quote-part dans le partage de la production d’or.

Une importante circulation d’espèces d’origine suspecte au niveau des fatana

Comme indiqué précédemment, l’extraction de l’or dans les fatana nécessite d’importantes ressources financières pour les investissements en matériels et équipements ainsi que les coûts opératoires. D’après l’enquête réalisée, ces financements mobilisés en amont des opérations auraient une origine suspecte. L’utilisation généralisée de liquidités au détriment des transactions bancaires rend difficile la traçabilité des opérations. Ces fonds sont parfois transférés à un épicier du village minier et aux autorités locales sans passer par une transaction bancaire. Les enquêtes menées ont également révélé que le mobile banking (système permettant de recevoir, déposer, retirer, conserver, transférer de l'agent et payer simplement en utilisant un téléphone portable) est couramment utilisé. À ce jour, aucun dispositif clair ne permet de retracer de telles opérations en Afrique (Interpol 2020). Si le SAMFIN, la cellule de renseignement financier à Madagascar, peut recevoir des déclarations d’opérations suspectes de la part d’opérateurs de mobile banking, ces derniers ne font que peu de déclarations.1f1554076e0f Il existe donc un risque élevé que les fonds qui circulent dans les fatana puissent être blanchis sans qu’ils ne soient détectés.

Des entreprises sponsors de plusieurs fatana

Par ailleurs, d’après l’enquête réalisée, les communes de Betsiaka et Dabolava ont constaté depuis 2017 que des entreprises exercent une double activité dans les sites d’extraction d’or : elles seraient à la fois acheteur et sponsor de plusieurs fatana et auraient installé des bureaux d’achat d’or dans les chefs-lieux de commune et de district.

En raison du prix proposé par ces entreprises, qui serait plus élevé que celui du marché, bon nombre de collecteurs et d’orpailleurs auraient été attirés par le fait de faire des affaires avec ces entreprises. Ces entreprises auraient également investi dans l’extraction directe de l’or dans les fatana avec des centaines d’équipements sophistiqués. Trois orpailleurs creuseurs et un conseiller de la commune de Betsiaka ont mentionné qu’une centaine d’ouvriers, produisant en moyenne 40 kilos d’or/an, seraient engagés par ces entreprises dont le coût d’opération moyen s’élèverait à 300 millions MGA par mois (75 000 USD). Toujours d’après l’enquête, ces entreprises prendraient en charge le paiement annuel des milliers de cartes professionnelles de leurs ouvriers (une carte d’orpailleur vaut 6 000 MGA – 2 USD) et continueraient leurs activités dans ces sites sans que l’administration ne questionne l’origine des fonds utilisés.

En raison du vide juridique sur l'exploitation dans les fatana, les acteurs comme le propriétaire du fatana, les sponsors, les intermédiaires, ne sont pas soumis aux impôts et taxes propres au secteur minier.

Phase de transport : pots-de-vin et faux laissez-passer

L’enquête menée sur les sites de Dabolava et de Betsiaka met en évidence que les sponsors déploient parfois des éléments des forces de défense et de sécurité (FDS) englobant la police nationale, la gendarmerie et les militaires, pour escorter/accompagner l’or du site d’exploitation vers la capitale.

Les services techniques concernés et les collectivités territoriales décentralisées (Direction régionale, polices des mines, commune concernée) seraient, quant à eux, complices de la sous-déclaration de la quantité d’or et du transport, sans laissez-passer ni récépissé de redevance.

Le long de la route, le contrôle des papiers nécessaires pour le transport d’or n’est qu’une formalité. Les sponsors appelleraient des responsables des FDS haut placés lorsqu’il s’agit d’une quantité d’or assez conséquente (plus de 10 kilos) afin de faire pression pour que l’or puisse être transporté. Un collecteur a indiqué n’avoir jamais été inquiété par les contrôles des FDS car il bénéficie d’une protection que son patron a négociée auprès de sa hiérarchie.

Par ailleurs, l’utilisation d’un faux laissez-passer et/ou le versement d’un pot-de-vin auprès des FDS seraient aussi courants dans le transport de l’or d’une région à une autre (voir Encadré 2). Selon les personnes interrogées, elles ont payé aux FDS entre 200 000 à 300 000 MGA par livraison (50-80 USD), soit 10 à 15 % de la marge bénéficiaire en contrepartie du transport d’or sans autorisation légale.

Encadré 2 : Carte routière en provenance de Bestiaka et Dabolava

1. Carte routière de l’or en provenance de Betsiaka

1er circuit : de Betsiaka vers Ambilobe, puis vers Ambanja et Nosy-Be et son aéroport international qui propose des vols directs vers l’étranger.

2e circuit : de Betsiaka vers Ambilobe puis vers Diego Suarez qui abrite aussi un aéroport international.

3e circuit : acheminement vers la RN4 via la RN5 pour finalement rejoindre la RN6. À partir de Sambava, il est possible d’exporter l’or par voie maritime vers les îles les plus proches de Madagascar, à savoir les Comores, l’île Maurice, les Seychelles et La Réunion.

4e circuit : de Betsiaka vers Ambilobe, puis d’Ambaja vers Antsohihy. Ensuite passage à Maevatanana pour rejoindre la capitale Antananarivo. L’or est par la suite exporté via l’aéroport international d’Ivato qui propose des vols directs vers l’étranger.

2. Carte routière de l’or en provenance de Dabolava

De Dabolava vers Miandrivazo, puis vers Ambositra pour rejoindre Antsirabe puis Antananarivo. L’or est par la suite exporté via l’aéroport international d’Ivato qui propose des vols directs vers l’étranger.

Source : Collecte des données au niveau de Dabolava et Betsiaka en août et septembre 2021

Par ailleurs, en 2020, l’aire protégée d’Andavakoera située près de Betsiaka a été l’objet d’extraction de plusieurs kilos d’or. Pourtant, le Code minier et le Code des aires protégées interdisent et excluent toute activité extractive dans les aires protégées. Lors de la descente à Betsiaka en septembre 2021, 15 collecteurs et un président de l’association des orpailleurs-creuseurs dans les villages d’Ambilo et Ampihimony, situés tout près de cette aire protégée, ont indiqué qu’il existait une certaine complicité entre les collecteurs et les forces de l’ordre et l’administration minière dans le transport de l’or jusqu'à destination de Nosy-Be et Antananarivo, en usant de faux laissez-passer attestant une origine différente.

Phase de commercialisation

Redevabilité des orpailleurs vis-à-vis des sponsors

Dans la pratique, la phase de commercialisation relative à l’or extrait des carrés miniers et des couloirs d’orpaillage respecte la phase de commercialisation décrite dans la chaîne de valeur théorique.

En ce qui concerne l’exploitation aurifère au niveau des fatana, si le titulaire du livret de fatana et le propriétaire du terrain où se situe ledit fatana sont une seule et même personne, celle-ci peut vendre l’or extrait à des collecteurs de son choix. Dans le cas contraire, l’or doit être proposé aux sponsors. Des collecteurs catégorie 1 circulent entre les chefs-lieux de commune pour acheter l’or. En moyenne, ces collecteurs catégorie 1 livrent 10-20 grammes d’or par semaine aux collecteurs catégorie 2 basés dans le district. Le prix de l’or est de 80 % du cours international. Il sera ensuite revendu à 85 % du cours international dans les grandes villes comme Antananarivo, Morondava ou Diego. 80 % des collecteurs interviewés lors de l’enquête effectuée sur les sites de Dabolava et de Betsiaka ont confirmé avoir acheté l’or extrait des gisements primaires dénommés fatana.

Changement de l’origine de l’or

Par ailleurs, l’enquête menée sur le terrain a permis d’établir que des orpailleurs-creuseurs préfèrent délocaliser le partage de leur production d’or hors de la région de Diana de peur d’être abusés et exploités par les autorités et les intermédiaires. L’or extrait de Betsiaka est ainsi acheminé vers les régions de Sofia et Sava et acheté par les collecteurs de ces régions pour être ensuite transporté dans la capitale. De ce fait, la production d’or dans la majorité des fatana n’est pas enregistrée au niveau de la commune de Betsiaka. Il est ainsi difficile de connaître l’origine de l’or qui a été extrait. À titre d’exemple, le rapport ITIE de 2017 montre que le volume d’or déclaré provenant de la commune de Betsiaka est de 38 kilos tandis qu’il est de 756 kilos dans la commune urbaine d’Ambilobe alors même que l'extraction d’or se trouve à Betsiaka et non à Ambilobe.

Aire protégée et risque de blanchiment d’or

En outre, la commercialisation de l’or extrait des aires protégées est une infraction au Code minier, étant donné que l’extraction minière est interdite dans les aires protégées. Il existe donc un risque important de blanchiment d’or.

Encadré 3 : Du faux-monnayage rapporté sur le site de Dabolava

Lors de la descente sur le terrain dans la commune de Dabolava, 10 collecteurs et 12 orpailleurs interviewés ont révélé qu’entre 2019 et 2022, deux négociants d’or de passage en provenance de la capitale (Antananarivo) non-enregistrés, ni au niveau de la commune, ni au niveau de l’ANOR, ont acheté de l’or dans la commune de Dabolava. En raison du prix proposé bien plus élevé que celui du marché, ces acheteurs auraient attiré plusieurs orpailleurs. D’après ces orpailleurs, des éléments de la gendarmerie auraient effectué une descente sur le marché suite à une plainte. L’intervention a conduit à l’arrestation de ces négociants et à la saisie d’une importante somme d’argent qui serait, d’après les collecteurs locaux enregistrés légalement, de faux-billets.

Source : Collecte des données au niveau de Dabolava et Betsiaka en août et septembre 2021

Des collecteurs non enregistrés au centre fiscal et statistique

Selon la loi en vigueur, toute personne physique ou morale qui voudrait exercer une activité à but lucratif doit payer une carte statistique d’un montant de 20 000 MGA (5 USD) et un impôt synthétique (un type d’impôt annuel sur les revenus) de 100 000 MGA (24 USD) par an pour un collecteur. Sur les 98 collecteurs interviewés, seulement 20 % sont enregistrés au niveau du centre fiscal et statistique malgré leur détention d’une carte de collecteur. La plupart de ces collecteurs refusent de payer cet impôt car ils indiquent ne plus pouvoir supporter une charge autre que la carte de collecteur.

Phase de transformation et valorisation de l’or : des bijoutiers dans l’illégalité

L’or extrait des sites d’exploitation se présente toujours sous deux formes : en poudre ou en pépite. Une fois transformé, l’or est plus facile à transporter. En général, les transformateurs locaux utilisent les mercures et les cyanures pour augmenter le carat de l’or avant la transformation en bijoux ou en lingot d’or.

Bien que les comptoirs de l’or, notamment les comptoirs de fonte, soient les seuls habilités à procéder à la transformation de l’or, dans la pratique ce sont les bijoutiers qui effectuent ce travail. Les bijoutiers transforment l’or en bijou ou en lingot en y ajoutant d’autres éléments minéraux. Or, les bijoutiers ne doivent utiliser que des anciens bijoux dans le cadre de leur activité. Il leur faut une autorisation de fonte pour la création de nouveaux bijoux. Certains de ces bijoutiers exercent donc leur activité dans l’illégalité.

Ce caractère illégal est propice à l’abus de fonction des inspections minières. N’exerçant pas dans la légalité, les bijoutiers peuvent se retrouver obligés de payer un pot-de-vin aux responsables de la Direction des mines lors des inspections minières pour pouvoir exercer cette activité et pour éviter que leurs produits ne soient saisis.

En ce qui concerne le poinçonnage, dans son rapport sur l’analyse de la corruption dans le secteur minier artisanal à Madagascar, Filière Or et Saphir de 2017, Transparency International Madagascar affirme que cette opération est « rarement appliquée par l’administration et respectée par les bijoutiers ».

Phase d’exportation : corruption, fraude fiscale, contrebande et trafic

Le 8 octobre 2020, le ministère des Mines et des Ressources stratégiques a décrété la suspension de l’exportation de l’or avec pour objectif d’assainir le secteur aurifère. Malgré cette suspension, de nombreuses quantités d’or ont été interceptées à l’étranger. Par exemple, 73,5 kilos d’or ont été saisis en Afrique de Sud le 31 décembre 2020.ebca206d1da1 L’exportation de l’or se fait soit par voie aérienne, soit par voie maritime.

Pratiques illicites par la voie aérienne

Au moment du contrôle des dossiers lors des procédures d’exportation de l’or, le certificat d’origine et le récépissé du paiement de la redevance minière sont souvent manquants. L’exportateur présente généralement un laissez-passer acheté auprès d’un titulaire de PRE ou propose un pot-de-vin aux responsables concernés. Une autre pratique consiste à réduire le montant de la facture d’achat qui est la base de calcul de la redevance minière, laquelle est assise sur la première vente. Par ailleurs, étant donné la vétusté des appareils du laboratoire national des industries extractives qui ne permet pas de faire des estimations fiables, il est aisé de sous-estimer l’or. Il en résulte donc une grosse perte de ressources pour l’État malgache.

L’entretien avec deux opérateurs d’or légalement constitués a révélé que même si les dossiers des opérateurs exportateurs sont complets et conformes au passage à l’aéroport, les opérateurs sont tout de même obligés de payer les services aéroportuaires chargés de procéder à la vérification des documents. Ces derniers abusent de leur fonction en remettant en cause le certificat de conformité délivré par le guichet unique. Selon ces deux opérateurs, ils peuvent payer jusqu’à 100 000 à 400 000 MGA (entre 24 et 94 USD), suivant les demandes de certains responsables. Les opérateurs pressés donnent des pots-de-vin pour accélérer la procédure, notamment l’accompagnement du colis jusqu’à l’entrée de l’avion.

Par ailleurs, deux inspecteurs des douanes, un membre de la police de l’air et des frontières et un responsable de service des mines en poste à l’Aéroport international ont révélé que des personnes réputées proches du gouvernement en place auraient fréquemment tenté de faire passer en contrebande des kilogrammes d’or à destination des Émirats arabes unis. Le colis aurait été introduit en contrebande en passant par la section du fret de l’aéroport et n’aurait pas été accompagné de la documentation requise. De connivence avec des personnes politiquement exposées, ces personnes réputées proches du gouvernement auraient transporté l’or à bord d’un avion d’une compagnie aérienne sans aucune forme d’inspection ou de paiement de taxes.

Le mode opératoire serait le suivant :

  • le recrutement d’un premier passeur, dont l’identité est inconnue, pour transporter l’or en lingots du domicile du propriétaire ou de l’hôtel désigné vers l’aéroport international ; puis
  • un deuxième passeur est chargé du transport du colis vers la cabine de l’avion. Les personnes interrogées n’ont pas donné le profil exact de ces passeurs mais elles ont confirmé que ces derniers sont en relation avec un troisième intervenant ; enfin
  • un troisième intervenant contacte directement les autorités aéroportuaires (la Compagnie de sécurité privée et industrielle-Madagascar la sécurité privée, Police de l'air et des frontières, l’Aviation civile de Madagascar, la gendarmerie et la douane) pour s’assurer que l’objectif est atteint.

Pratiques illicites par la voie maritime

Un entretien a été réalisé en ligne avec un ancien responsable de l’APM (Agence portuaire maritime sise à Nosy-Be) et deux organisations régionales de la société civile dans le district de Nosy-Be. Ces acteurs ont mentionné l’existence d’un trafic d’or par voie maritime dont Nosy-Be et Sainte-Marie sont les portes de sortie. Les trafiquants utiliseraient un petit bateau de plaisance pour dissimuler et transporter l’or à la limite des eaux territoriales. Le bateau de plaisance serait, par la suite, relayé par un navire cargo pour le transport des marchandises. Toujours d’après les interviewés, les destinations finales de l’or seraient les Émirats arabes unis (dont Dubaï), l’Italie et la Chine en passant par la Réunion et les Seychelles. Depuis la suspension d’exportation d’or en octobre 2020, ce trafic se serait accentué. Par exemple, d’après l’Agence portuaire maritime (novembre 2021), 22,5 kilos d’or à bord d’un navire ayant quitté Nosy-Be le 12 octobre 2021 ont été interceptés aux Seychelles.18fd3721c5a4

Influence des élites politiques dans l’exportation illicite de l’or

Plusieurs acteurs sont impliqués afin de permettre l’exportation illicite de l’or :

  • les élites politiques qui seraient composées de parlementaires et de hauts fonctionnaires du gouvernement ;
  • les services techniques tels que les douanes, forces de l’ordre, transport, les services de sûreté aéroportuaire ;
  • les opérateurs privés : collecteurs locaux et régionaux, négociants /intermédiaires installés dans la capitale et investisseurs étrangers.

Société écran - Non-rapatriement des devises - Dissimulation de devises non rapatriées

Entre juillet 2015 et juillet 2016, l’Economic Development Board of Madagascar a enregistré une augmentation de la création de sociétés exportatrices d’or. En moyenne, cinq sociétés dans le domaine de l’achat et l’export d’or ont été enregistrées sur une seule année. Un total de 17 sociétés exploratrices d’or sont enregistrées (rapport ITIE 2020). D’après les commissionnaires agréés et confirmés par le service des finances externes (FINEX) au sein du ministère des Finances, la plupart de ces sociétés exportatrices n’ont pas de personnel permanent mais un responsable-gérant qui dirige la structure.

Selon des responsables de trois sociétés exportatrices d’or situées à Antananarivo, ce sont en réalité des sociétés étrangères qui exportent l’or de Madagascar en se dissimulant derrière des sociétés à responsabilité limitée unipersonnelle (SARLU) malgaches. Ces SARLU sont enregistrées au niveau de l’ANOR à titre de comptoir d’or et sont les intermédiaires à travers lesquels tous les dossiers d’exportation sont traités. Les gérants de ces SARLU sont de nationalité malgache. Ces sociétés assurent l’acheminement de l’or vers les sociétés d’acheteurs et tous les fonds alloués à l’achat de l’or sont transférés et domiciliés sur les comptes de ces SARLU. Les gérants ne sont pas des salariés permanents mais ils sont rémunérés en fonction du volume d’exportation effectué.

D’après les personnes interviewées susmentionnées, le chiffre d’affaires en une année de ces SARLU aurait atteint 400 milliards MGA (94 millions USD) entre 2017-2019, avec 50-100 kilos d’or exportés par mois. Malheureusement, les sociétés exportatrices (situées entre autres aux Emirats arabes unis, en Afrique du Sud, en Éthiopie, etc.) n’ont pas rapatrié leurs devises comme l’exige la loi. En 2020, trois gérants de trois sociétés exportatrices d’or ont d’ailleurs été appréhendés pour non-rapatriement de devises (Express de Madagascar, 2021).

En mars 2022, trois exportateurs d’or malgaches et une femme gérante propriétaire de trois sociétés exportatrices en attente de leur procès au niveau du pôle anti-corruption (PAC) pour une affaire de non-rapatriement de devises ont été interviewés dans le cadre de cette étude. Ces acteurs ont dévoilé que les produits tirés de la vente d’or non rapatriés sont utilisés pour acheter des marchandises (vêtements, téléphones, équipements électroniques, etc.) aux noms d’entreprises chinoises et malgaches, et exportés par la suite à Madagascar. Ils vendent ces marchandises en gros pour faire circuler les fonds utilisés. Les bénéfices encaissés sont par la suite réutilisés pour l’achat et l’extraction d’or. Cette pratique aurait, selon leurs dires, fonctionné jusqu’en octobre 2020. Elle a depuis été découverte par le Trésor public et FINEX à travers l’utilisation d’un système intégré de gestion des opérations de change.

Le mécanisme des transactions, une porte ouverte à l’impunité

Un examen attentif de la loi n° 2005-021 du Code minier révèle l’existence d’un mécanisme permettant aux contrevenants de se soustraire à des poursuites pénales. Ce système appelé « transactions » neutralise la poursuite de toutes les infractions énoncées dans le Code minier à l’exception de celles qualifiées de crimes ou tendant à créer des conflits entre le contrevenant et la population locale (art. 208). La consécration d’un tel mécanisme remet en question l’utilité même du Code minier. Par ailleurs, le législateur n’a pas pris le soin d’expliciter les conditions motivant l’acceptation de ces transactions. Ce manque d’encadrement nourrit la possibilité d’arbitraire de l’autorité décisionnaire et augmente les risques de corruption. Ces dispositions du Code minier relatives aux transactions permettent l’ingérence du ministre chargé des mines, et donc du pouvoir exécutif, dans des affaires relevant de l’ordre judiciaire, ce qui est une atteinte au principe de séparation des pouvoirs consacré dans le préambule de la Constitution malgache.

Looking for gold in a river.

Tamisage de la vase issue du cours d'eau avec une gamelle en emmaillé (Menabe, Dabolava)

Credit: Daniel Rabemazava copyrighted

Les risques de FFI dans la chaîne de valeur de l’or

La principale forme de flux financiers illicites constatée dans le secteur aurifère sur les deux sites de l’étude est la corruption. La corruption est présente de la phase administrative relative à la délivrance du permis minier et de l’autorisation d’exploitation (carte orpailleur) jusqu’à la phase d’exportation. Elle est également une pratique courante, que ce soit sur les sites d’extraction reconnus par le Code minier, en l’occurrence dans les carrés miniers et les couloirs d’orpaillage, ou sur les sites d’extraction dans les filons en roche mère ou fatana. Mis à part la corruption, il a été également identifié une autre forme de flux financier durant la phase d’exploitation qui est l’exploitation illégale des ressources naturelles ainsi que le blanchiment de l’or. Dans la phase d’exportation, d’autres formes de FFI apparaissent telles que la fraude et l’évasion fiscale lors de l’exportation par voie aérienne, la contrebande et le trafic lors de l’exportation par voie maritime, et le blanchiment de capitaux pour dissimiler les devises non rapatriées.

Certains problèmes que nous avons identifiés, tels que le vide juridique par rapport à l’extraction aurifère dans les fatana, le manque de communication entre les institutions étatiques, la répartition disparate des rôles des institutions, l’exercice des activités de collecteurs en dehors des lieux autorisés, la circulation des faux billets dans l’achat de l’or, contribuent également aux FFI (Encadré 5).

Encadré 5 : Les principales causes de FFI

Un manque de communication entre les institutions étatiques

Un manque de communication et de partage d’informations entre les institutions, notamment entre la commune, le centre fiscal et la Direction de la statistique, le Trésor public et l’ANOR, a été noté durant l’enquête menée sur les sites de Dabolava et de Betsiaka. Normalement, les données portant sur l’effectif des contribuables dans le secteur aurifère, les ristournes minières ainsi que les sociétés exportatrices d’or et comptoirs d’or devraient être cohérentes, ce qui n’était pas le cas d’après l’analyse des données récoltées auprès des institutions concernées.

Une répartition disparate des rôles des institutions

L’articulation des démarches auprès des diverses institutions manque de coordination. On déplore notamment la répartition disparate des rôles entre la Direction interrégionale des mines et l’ANOR dans la gestion du secteur aurifère. Cela reste confus dans le Code minier et le décret portant régime de l’or ne fait pas la différence entre le rôle de l’ANOR et celui de la Direction régionale des mines.

Exercice des activités des collecteurs en dehors des lieux autorisés

De petits collecteurs (catégorie 1) circulent entre les chefs-lieux de commune et de district pour vendre l’or aux grands collecteurs (catégorie 2) basés dans un district. Ces activités constituent une infraction par rapport aux textes en vigueur car un collecteur catégorie 1 ne peut exercer son activité en dehors du Fokontany. Ceci fausse l’origine de l’or et représente une perte de ressources pour la commune d’extraction car l’or n’y sera pas déclaré.

La corruption est présente de la phase administrative relative à la délivrance du permis minier et de l’autorisation d’exploitation jusqu’à la phase d’exportation.

Le tableau 3 résume les différents risques de FFI constatés lors de l’enquête pour chaque étape de la chaîne de valeur de l’or.

Tableau 3 : Résumé des risques des FFI dans la chaîne de valeur du secteur de l’EMAPE aurifère

Phase

Les problèmes identifiés

Lien avec FFI

(Oui/Non)

Possibles formes de FFI (si applicable)

Flux financiers illicites correspondants

Administrative et installation

Orpaillage mécanisé : une disposition sous silence

Oui

Les autorités peuvent profiter de l’ignorance des creuseurs concernant l’Arrêté 7903/2013 relatif à l’orpaillage mécanisé pour abuser de leur fonction. Les creuseurs, pensant qu'ils sont dans une situation irrégulière, se sentent obligés de payer une certaine somme pour pouvoir continuer à exploiter l'or avec des outils mécanisés.

Corruption

Gel de l’octroi des permis miniers

Oui

Le gel de l’octroi des permis miniers a favorisé les risques de corruption, notamment dans les interférences politiques et le paiement de pots-de-vin pour accélérer l’octroi des permis miniers.

Corruption

Vide juridique par rapport à l’extraction aurifère dans les fatana

Oui

Ce vide juridique a engendré plusieurs formes de corruption notamment favoritisme, pots-de-vin, trafics d’influence, abus de fonction tout au long de la chaîne de valeur de l’or.

Par exemple : favoritisme des autorités dans le cadre du règlement de conflit dans les fatana ; compétition entre les propriétaires de fatana conduisant à des arrestations arbitraires ; sponsors versant des pots-de-vin aux forces de l'ordre pour la garde à vue d'une équipe qui a trouvé de l'or dans un fatana ayant atteint les 30 mètres de profondeur. En outre, des assistants parlementaires seraient intervenus  au niveau des autorités locales dans le cadre d'un règlement de conflit dans les fatana en échange d'un pourcentage de production lors de la vente de l'or.

Corruption

Faible taux d’enregistrement des orpailleurs

Oui

Les orpailleurs sont victimes d’abus de pouvoir et de racket par les autorités lors des contrôles.

Corruption

Conflits entre les titulaires de livrets de fatana/permis minier et les propriétaires de terrain

Oui

Les opérateurs (titulaires de PRE et de livret de fatana, orpailleurs) corrompent les autorités en offrant des pots-de-vin pour se soustraire à cette obligation légale.

Corruption

Exploitation

Protection apportée dans les fatana

Oui

Collaboration entre les opérateurs des fatana et les autorités locales : les autorités locales au niveau du district ainsi que les forces de l'ordre et les magistrats offrent leur soutien et appui s'il y a un litige dans les fatana. En contrepartie, ils perçoivent leur part de production après la vente de l'or.

Corruption

Circulation d’espèces au niveau des fatana

Oui/Non

L’origine des fonds reste douteuse. Aucun blanchiment d’argent ne peut être affirmé. Par contre, au vue de l’origine douteuse, une suspicion de blanchiment peut être émise.

Blanchiment de capitaux

Sponsors échappant au Code minier

Non

Compte tenu d’un vide juridique concernant les fatana, il est difficile d’établir le type de FFI concerné.

N/A

Exploitation aurifère à l’intérieur d’une aire protégée

Oui

L’or extrait de l’aire protégée est introduit dans le circuit légal avec la complicité des autorités. Versement de pots-de-vin pour obtenir le certificat d’origine.

Exploitation illégale des ressources naturelles Blanchiment d’or

Corruption

Fausse déclaration de l’origine de l’or venant des fatana

Oui

Infraction minière.

Risque de versement de pots-de-vin au responsable communal à qui l'or va être déclaré.

Corruption

Transport

Utilisation de faux laissez-passer et/ou versement d’un pot-de-vin

Oui

Corruption des forces de l’ordre lors du transport de l’or.

Corruption

Commercialisation

Fixation de prix d’achat par les sponsors

Non

Vide juridique.

N/A

Manque de communication entre les institutions étatiques : commune, INSTAT, ANOR, Trésorerie publique

Non

Problème de gouvernance du secteur aurifère malgache.

N/A

Répartition disparate des rôles des institutions : ANOR et Direction des mines

Non

Problème de gouvernance du secteur aurifère malgache.

N/A

Circulation de faux billets dans l’achat de l’or

Oui

Problème du dispositif de contrôle au niveau étatique.

Blanchiment de capitaux

Exercice des activités des collecteurs en dehors des lieux autorisés

Oui

Problème du dispositif de contrôle au niveau étatique. Versement de pots-de-vin aux agents qui contrôlent les cartes de collecteurs.

Corruption

Transformation

Présence d’artisans et bijoutiers informels

Oui

Propice à l’abus de fonction des inspections minières ainsi qu’au versement de pots-de-vin.

Corruption

Poinçonnage : rarement appliqué par l’administration et respecté par les bijoutiers

Non

Il s’agit plutôt une infraction minière.

N/A

Exportation

Versement de pots-de-vin à l’aéroport international d’Ivato

Oui

L’exportateur propose un pot-de-vin aux responsables en charge du contrôle des dossiers lors des procédures d’exportation de l’or.

Corruption

Réduction du montant de la facture d’achat qui est la base de calcul de la redevance minière, laquelle est assise sur la première vente lors de l’exportation

Oui

Action délibérée et illégale de l’exportateur, conduisant à réduire le montant de la redevance minière

Fraude fiscale

Sous-évaluation de la qualité de l’or

Oui

La vétusté des appareils du laboratoire national des industries extractives ne permet pas d’identifier l’or lorsque la qualité est supérieure à 18 carats.

Évasion fiscale

Influence des élites politiques lors de l’exportation par voie aérienne

Oui

De connivence avec des personnes politiquement exposées (PPE), les exportateurs auraient transporté de l’or à bord d’un avion d’une compagnie aérienne sans aucune forme d’inspection ou de paiement de taxes (possible trafic d’influence et abus de fonction).

Corruption

Trafic d’or par voie maritime dont Nosy-Be et Sainte-Marie sont les portes de sortie

Oui

Violation des dispositions réglementaires portant sur la prohibition d’exportation.

Pots-de-vin et trafic d’influence pour faire sortir l’or du territoire malgache.

Contrebande et trafic

Corruption

Non-rapatriement des devises

Non

Infraction minière.

N/A

Dissimilation de devises non-rapatriées

Oui

Les produits tirés de la vente d’or non rapatriés sont utilisés pour acheter des marchandises (vêtements, téléphones, équipements électroniques, etc.) aux noms d’entreprises chinoises ou malgaches, et exportés par la suite à Madagascar. Ces marchandises sont vendues en gros pour faire circuler les fonds utilisés et être réinvestis dans l’exploitation de l’or.

Blanchiment de capitaux

Autre

En cas d’infraction : mécanisme de transaction

Oui

Absence d’encadrement relatif au mécanisme de transaction avec risque de décisions arbitraires et versement de pots-de-vin pour solder l’infraction.

Corruption

L’État malgache, un État perdant dans l’exploitation aurifère

Cette étude s’est intéressée aux pratiques illicites dans le secteur aurifère de l’exploitation minière artisanale et à petite échelle à Madagascar dans le cadre des sites de Betsiaka et de Dabolava. Elle met en exergue les formes de corruption et autres pratiques illicites associées au secteur, les étapes de la chaîne de valeur où elles se déroulent, les méthodes et mécanismes utilisés, les acteurs impliqués, et les points institutionnels de vulnérabilité.

Les résultats de l’étude ont montré qu’une zone d’exploitation de l’or artisanal, les filons en roche mère ou fatana, échappe au Code minier malgache. Il en va donc de même de la majorité de l’or produit. Malgré tout, un mode de gouvernance locale s’est mis en place avec le concours des autorités locales, car cette exploitation attire la convoitise de nombreux acteurs. L’étude a également contribué à faire ressortir les acteurs exerçant leurs activités et leur mode opératoire depuis l’installation dans les fatana jusqu’à l’exportation de leur production.

Outre les acteurs privés et publics dans le secteur aurifère EMAPE reconnus par les dispositions légales, il a été identifié d’autres acteurs à l’instar des sponsors qui financent l’extraction dans les fatana, les intermédiaires autres que les collecteurs agréés dans l’achat et la vente de l’or se situant non seulement dans les sites d’exploitation mais aussi dans les grandes villes, et l’implication des élites politiques dans la facilitation du transport et de l’exportation de l’or à destination des Émirats arabes unis, de l’Italie et de la Chine en passant par l’Afrique du Sud, La Réunion et Les Seychelles. La complicité entre ces acteurs crée un système de réseaux dynamiques et organisés favorisant les trafics d’or.

L’étude a par ailleurs permis de révéler que l’exploitation aurifère EMAPE à Betsiaka et Dabolava, qu’elle soit reconnue ou non par les dispositions légales, est entachée de flux financiers illicites depuis la phase administrative jusqu’à la phase d’exportation.

Enfin, sur la base des facteurs et problèmes identifiés et les risques de flux financiers illicites, l’étude propose les recommandations suivantes :

Table des recommandations

Acteurs

Recommandations stratégiques

Administration minière - tous les ministères concernés par les activités minières : ministère des Mines, ministère des Finances, ministère de Défenses nationales, ministère de la Justice, Ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation

  • Amender le Code minier 2005 et ses textes subséquents, dont le décret n°2006-910 du 19 décembre 2006 fixant ses modalités d’application, ainsi que le décret n° 2015-1035 du 30 juin 2015 portant Régime de l’or afin d’inclure l’extraction dans les filons en roche mère, son mode de gouvernance locale. La législation doit être conforme à la réalité. La transaction est à enlever dans la révision du Code minier.
  • Réactualiser et mettre en œuvre de la Stratégie de Développement Durable EMAPE élaborée en 2018. Cette stratégie a été élaborée par les parties prenantes dans le secteur des petites mines afin d’assurer une conciliation entre les activités du secteur EMAPE et l’objectif de développement durable, tout en considérant le contexte économique, social et environnemental. Cependant, elle n’a pas été appliquée.
  • Supprimer la suspension de l’octroi de nouveaux permis tout en garantissant l’accès des périmètres aux nationaux.
  • Vulgariser les textes en vigueur. La diffusion des textes et les mécanismes de sensibilisation sont nécessaires étant donné la méconnaissance des lois en vigueur.
  • Renforcer la communication entre les institutions étatiques notamment entre la commune, le centre fiscal et la Direction de la statistique, le Trésor public et l’ANOR, à travers la mise en place d’une plateforme numérique d’échange de données entre ces institutions.
  • Éclaircir les rôles et attributions entre les institutions en charge de la gestion du secteur aurifère EMAPE, en l’occurrence les directions interrégionales des mines, l’ANOR, les collectivités territoriales décentralisées, les bureaux administratifs miniers, etc.
  • Renforcer les capacités de l’administration minière à appliquer la législation minière nationale et à contrôler le respect par les acteurs privés dans le secteur aurifère EMAPE.
  • Renforcer la gestion de proximité. La gestion de proximité touche les services des mines, l’ANOR, les communes. Son opérationnalisation effective incite les concernés à participer davantage à l’amélioration de la gouvernance du secteur aurifère EMAPE.
  • Mettre en place une politique interne de lutte contre la corruption selon les dispositions de l’article 6 de la loi anti-corruption 2016-020 du 22 août 2016.
  • Divulguer de manière systématique et annuelle des informations contextuelles relatives au secteur aurifère : contribution du secteur aurifère, quantité exportée, et nom des sociétés exportatrices d’or.
  • Intensifier la formation des autorités régionales et locales en prenant soin de former non seulement les élus, mais aussi les fonctionnaires permanents qui assureront la continuité durant et après les échéances électorales. Ces formations devraient inclure : les procédures, les textes en vigueur, le plaidoyer, la fiscalité.

Acteurs

Recommandations par phase

Exploitation

Administration minière - tous les ministères concernés par les activités minières : ministère des Mines, ministère des Finances, ministère de la Défense nationale, ministère de la Justice, ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation

  • Revoir la chaîne de valeur de l’orpaillage pour ajuster les catégories d’acteurs habilités par la loi minière : propriétaires des terrains, propriétaires de trous, sponsors, etc.
  • Encadrer et officialiser leur rôle tout en faisant en sorte qu’ils soient reconnus comme acteurs dans les textes de loi et que leurs responsabilités, droits et obligations soient spécifiés.
  • Passer des « couloirs » aux « zones réservées » d’orpaillage pour réduire l’extraction d’or dans les fatana : un périmètre bien délimité et affecté exclusivement à l’exploitation artisanale de l’or pour une période donnée : zone d’encadrement prise en Conseil des ministres.
  • Rationaliser l’organisation administrative des structures chargées d’encadrer l’activité d’extraction d’or pour éviter le chevauchement des compétences et duplication des tâches : renforcer la mise en place du bureau d’administration minière au niveau des zones à forte potentialité aurifère qui serait alors une sorte de guichet unique au niveau local.
  • Mettre à disposition des usagers des brochures sur les procédures et les tarifs en malgache et en français.
  • Mettre en place des standards de services pour prévenir et lutter contre la corruption.
  • Mettre à jour des données aux niveaux du BCMM et ANOR.
  • Publication annuelle par les communes et régions des bénéficiaires des ristournes issues de l’activité aurifère.

Direction générale des impôts

  • Adopter un régime d’imposition spécifique à l’exploitation de l’or beaucoup plus adapté que le régime applicable à l’exploitation minière dans son ensemble.
  • Réduire le nombre d’impôts, droits et taxes à acquitter par les orpailleurs et travailleurs mineurs dans les sites d’extraction d’or artisanale et à petite échelle et opter pour un collecteur unique ou tout au plus réduire le nombre d’administrations collectrices : impôt synthétique, carte statistique et carte d’orpaillage.
  • Déconcentrer au niveau du trésor public régional et ses démembrements au niveau du district la perception des redevances minières. 
  • Renforcer les capacités des collectivités territoriales décentralisées.

Les orpailleurs-creuseurs - les sponsors et propriétaires de terrain

  • Soumettre aux initiatives de traçabilité mises en place par l’administration minière, entre autres : création et opérationnalisation du bureau d’administration minière.
  • Plaidoyer auprès des autorités pour que les sponsors et propriétaires de terrains soient reconnus comme acteurs dans les textes de loi et que leurs responsabilités, droits et obligations soient spécifiés.
  • Promouvoir/investir dans la création de coopératives.
  • Sur la base de la Stratégie de développement durable EMAPE, normaliser les artisans miniers selon les trois piliers ci-après : la restructuration, la formalisation et la professionnalisation des artisans.
  • Sensibiliser les propriétaires du sol sur leurs droits et obligations par rapport à l’activité minière.
  • Faciliter l’octroi des titres fonciers aux propriétaires terriens traditionnels

Les collectivités territoriales décentralisées : commune et région

  • En collaboration avec le système anticorruption (SAMIFIN, BIANCO), mettre en place un mécanisme de contrôle de l’origine des fonds utilisés par les acteurs concernés : sponsors, collecteurs.
  • Développer la coopération avec l’administration minière et la Direction générale des impôts pour renforcer la lutte contre la fraude fiscale, notamment la fausse déclaration. 

Les organisations de la société civile

  • Soutenir les efforts de promotion et de sensibilisation aux pratiques d’extraction aurifère responsable.
  • Participer aux efforts de collecte d’informations et de signalement aux autorités publiques des comportements douteux des acteurs (notamment les sponsors.)

Le système anti-corruption : BIANCO, SAMIFIN

  • Sensibiliser les fonctionnaires à l’incompatibilité entre leurs fonctions et l’interférence dans l’extraction aurifère.
  • Appliquer les sanctions administratives et des mesures plus répressives pour les fonctionnaires qui occupent une double fonction.
  • Développer des services publics (par exemple : numéros verts anti-corruption) que les opérateurs, y compris les orpailleurs, peuvent saisir pour dénoncer les interférences des fonctionnaires dans l’activité d’extraction aurifère.
  • Renforcer la collaboration avec les collectivités territoriales décentralisées pour mener une diligence sur l’origine des fonds utilisés par les sponsors et collecteurs.

 

Commercialisation

Administration minière

  • En collaboration avec le secteur privé, créer une centrale d’achat ou un marché de l’or près des sites aurifères. Cela est commode pour les orpailleurs, qui peuvent vendre leur or directement sur place et également pour l’État et les Collectivités territoriales décentralisées (CTD) qui peuvent contrôler le circuit de l’or afin d’éviter l’évasion et la fraude fiscale.
  • Introduire et définir les notions juridiques d’« or artisanal propre » sur la base de normes environnementales, sociales et fiscales pour promouvoir un mécanisme incitatif de rachat applicable à cette catégorie d’or artisanal.
  • Introduire des labels de certification « or propre » qui attestent que cet or a été produit de manière responsable.

Direction générale des impôts et du Trésor public

  • En collaboration avec l’ANOR et les CTD et l’administration minière, organiser des campagnes de sensibilisation périodiques pour faire connaître aux collecteurs et orpailleurs leurs droits et obligations : impôts et taxe.

Les orpailleurs-creuseurs - les collecteurs

  • Les orpailleurs-creuseurs - les collecteurs intègrent une centrale d’achat ou un marché de l’or près des sites aurifères mis en place par l’administration minière en collaboration avec le secteur privé.

Les collectivités territoriales décentralisées : commune et région

  • En collaboration avec l’administration minière et le Trésor public, appliquer la perception à la source des redevances et ristournes minières des petites mines, notamment sur l’or produit par orpaillage.
  • Renforcer la collaboration avec les collectivités territoriales décentralisées pour mener une diligence sur l’origine des fonds utilisés par les acheteurs d’or dans le marché local.

Les organisations de la société civile

  • Sensibiliser les orpailleurs et collecteurs aux bienfaits de leur intégration dans une centrale d’achat ou un marché de l’or près des sites aurifères mis en place par l’administration minière en collaboration avec le secteur privé.

Le système anti-corruption : BIANCO, SAMIFIN

  • En collaboration avec les banques locales, encourager ou contraindre l'inclusion bancaire des acheteurs d’or, notamment des collecteurs.

Transport

Administration minière

  • Former les polices de la route aux infractions sur le transport des minerais.
  • Solliciter la déclaration de patrimoine des personnes responsables des contrôles.
  • Améliorer le système de laissez-passer pour éviter le blanchiment d’or et la corruption.
  • Développer une application à l’usage de la police des mines pour la vérification des permis miniers, des laissez-passer et des autorisations.

Collecteur agréé et comptoir, titulaire de permis

  • Encourager les collecteurs agréés, les comptoirs d’or et les titulaires de permis à dénoncer les cas de corruption, et garantir leur anonymat ainsi que la protection des témoins.

Le système anti-corruption : BIANCO, SAMIFIN

  • Déployer plus de moyens (ressources humaines, financières et matérielles) dans les branches territoriales de BIANCO.
  • Renforcer la collaboration du système anti-corruption avec les CTD dans les zones à forte potentialité minières dont l’or.
  • Redynamiser et faire fonctionner de nouveau le système de réseaux d’acteurs mis en place en 2015-2017 dans les branches territoriales de BIANCO : à savoir, des personnes au niveau local qui peuvent alimenter des informations de façon permanente, sorte de lanceurs d’alerte de corruption, de suspicion de blanchiment d’argent et autres types de FFI.
  • Mettre en place le démembrement de SAMIFIN dans les régions à forte potentialité aurifère.

Transformation

Ministère des Mines et des Ressources stratégiques, ANOR

  • Mettre à jour le matériel utilisé dans le laboratoire des Mines pour mieux identifier la qualité de l’or.
  • Promouvoir la mise en place des sociétés d’affinage et de traitement de l’or à Madagascar pour transformer l’or brut en or monétaire en vue d’augmenter les recettes publiques, améliorer la traçabilité de la chaîne d'approvisionnement en or et la formalité de l'industrie aurifère malgache.
  • Faciliter la formalisation des bijoutiers.

Bijoutiers, comptoir de fonte

  • Se conformer aux dispositions mises en place par la législation malgache pour la transformation de l’or en bijoux, l’export et l’import des bijoux.

Exportation

Administration minière - Institution de lutte contre la corruption – Ministère de la Défense

  • Renforcer les dispositifs de prévention et de lutte contre la corruption au niveau des aéroports internationaux à Madagascar, en collaboration avec le BIANCO.
  • Renforcer les dispositifs de surveillance des côtes de Madagascar pour lutter contre l’exportation illicite de l’or par voie maritime.
  • Réfléchir et mettre en place un plan d’action pour lutter contre la contrebande et le trafic illicite de l’or. En effet, sur le long terme, la mesure de suspension de l’exportation de l’or favorise la contrebande.

 

A woman at a table with a plate in front of her, containing scales for measuring gold.

Credit: Daniel Rabemazava copyrighted

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  2. HakiliTimes, 2019.
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  5. La Vérité, 2021.
  6. Midi-Madagasikara, 2022.
  7. La loi n°90-017 du 20 juillet 1990, la loi n°95-016 du 5 août 1995, la loi n° 99-022 du 19 août 1999 et la loi n° 2005-021 du 17 octobre 2005.
  8. L’ordonnance n°62-103 portant loi minière puis le décret n° 95-325 du 3 mai 1995 et le décret n° 2015-1035 du 30 juin 2015.
  9. Madagascar-Tribune, 2020.
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  35. La dimension d’un carré minier est l’équivalent de 625 mètres de côtés.
  36. Subdivision administrative malgache pouvant comprendre des hameaux, des villages, des secteurs ou des quartiers.
  37. Article 149 du Code minier.
  38. Source : Trésorier de la commune rurale de Betsiaka, 2021.
  39. Source : Secrétaire de la commune de Dabolava, 2021.
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  41. Source : Douane malgache, Article du 5 janvier 2021.
  42. Douanes, 2021.

References

Abbreviations

Acknowledgements


Nous remercions tout particulièrement le comité de pilotage de l’étude composée de l’équipe de U4 et la GIZ Madagascar de nous avoir accordé leur confiance pour la réalisation de cette étude aux enjeux multiples pour Madagascar. Nous tenons à exprimer notre gratitude pour leur appui et leurs remarques tout au long de l’étude qui ont permis de mener à bien cette recherche et d’enrichir le rapport. Un remerciement tout particulier à Sophie Lemaître pour ses conseils qui ont grandement contribué à améliorer le rapport. Nos remerciements vont également à toutes les personnes que nous avons contactées lors de nos recherches sur le terrain à Antananarivo, Dabolava et Betsiaka notamment les orpailleurs, collecteurs, bijoutiers, exportateurs d’or, les institutions étatiques à tous les niveaux, les organisations de la société civile pour leur disponibilité et pour avoir accepté de répondre à nos questions, ce qui nous a permis de mieux appréhender le sujet et d’enrichir nos réflexions. Nous adressons aussi notre gratitude aux personnes qui nous ont appuyé dans cette étude mais aussi pour la relecture. Nous adressons particulièrement nos remerciements à : Brian Klein, Vololona Rakotonomenjanahary, Priscilla Rakotomalala, HeryTiana Ratovonar, Tania Rakotoarivony. [Traduction en langue française : Nellie Tournaud]